La métaphore de l’enfant étranger : double impasse, double promesse

Opportunément juché sur les épaules d’E.T.A. Hoffmann, bien placé donc, à se fier aux louanges de Freud qui l’encense comme « maître inégalé » de l’Unheimlich en littérature dans son célèbre article sur la question, nous nous proposons d’exploiter la veine métaphorique de L’Enfant étranger, merveilleusement filée tout au long d’un de ses contes où ce magicien éblouissant exerce une fois de plus sa verve au service des secrets et mystères de notre condition humaine. Serpentant avec délice entre rire moqueur et larmes d’émotion, ce récit échevelé, malgré sa construction rigoureuse riche de profondes harmoniques, met en scène l’irruption d’un enfant étrange, venu d’ailleurs, auquel chacun des membres d’une famille originale sera tour à tour confronté pour une mise à l’épreuve de ses capacités et limites identificatoires. Double et confident versatile de tous, dont il devient la projection irisée, il n’appartient à personne, demeure inaccessible et échappe ainsi à quiconque s’y réfère comme médiateur onirique. Comme l’hallucination, l’enfant étranger, mirage d’un monde intermédiaire, s’avère bien plus réel, bien plus présent, que la réalité qui s’escrime à l’escamoter ou le flouter pour le nier ou le récuser. Longtemps après sa disparition matérielle, son empreinte résiduelle persiste et demeure familière, comme une inaccessible nostalgie, un impossible abri, un ultime recours, bien plus vivaces en nous que toutes les fausses réassurances dérisoires issues du bon sens, de la rationalité, de la science et de la culture.

Auteur
Jean-Marie Barthélémy
docteur ès lettres et sciences humaines,
professeur émérite de
psychopathologie et psychologie clinique,
université Savoie-Mont-Blanc, Chambéry
Référence
RA009-22
L’Étranger
Journées d’Automne 2016
Catégories
art-thérapie, psychologie, cinéma, musique
Noms propres
Duchamp M., Hergé, Caravage M., Sadoul N.
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