Aimable Jayet ou les replis de l’intime

Quelle place pour l’intime dans la vie quotidienne d’un patient d’un hôpital psychiatrique au milieu du XX e siècle ?
Aimable Jayet (Saint-Martin-des-Entrées, 1883 — Saint-Alban-
sur-Limagnole, 1953), ancien artisan boucher, est l’auteur de
dessins et d’écrits produits entre 1941 et 1949 dans le cadre de
l’hôpital de Saint-Alban en Lozère. Dans ce contexte particulier,
où s’articulent surréalisme et une clinique nourrie de phénoménologie et de psychanalyse, quelques premières œuvres de Jayet sont conservées par le psychiatre et désaliéniste Lucien Bon-
nafé. Toutefois il faut attendre 1948 et l’intervention de Jean
Oury, alors interne à Saint-Alban, pour qu’un nouveau pan de
la production de Jayet soit transmis à Jean Dubuffet pour sa
toute jeune collection d’art brut.
Par l’écriture, le dessin et le façonnage de papier d’emballage,
Jayet invente un lieu d’expression et de refuge. Sa dimension
littéraire est portée par une succession d’écritures ordinaires
(listes, papiers administratifs, écriture télégraphique, affiche,
réclame). Ce qui relèverait du journal intime est transfiguré
dans un agencement complexe, un extra-ordinaire situé entre
l’histoire personnelle et le contexte asilaire.
En 1946, le cahier manufacturé abrite à son tour les mots, qui
eux-mêmes conservent un secret fait de papier plié. Ce contre espace à l’asile constitué de plis et de détours dessine un précaire, mais durable, révélateur et protecteur de l’intime.

Auteur
Christophe Boulanger
docteur en esthétique,
attaché de conservation au LaM,
en charge de la collection d’art brut
leromanfou@gmail.com
Référence
RA010-19
L’Intime
Journées d’Automne 2017
Catégories
Art brut
Dessin
Architecture
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