Ça se mérite, l’inattendu… !

Entre un jeune chercheur qui confiait à notre relecture médusée son premier projet de publication, dont une « conclusion » composée d’une litanie monotone de paragraphes commençant presque tous par « Comme attendu », et une patiente angélique qui, à contresens de notre bienveillance téléguidée, nous déballait, lors d’un magistral tour de passe-passe printanier, un couple de jonquilles là où nous étions sûrs de trouver une fleur solitaire fraîchement éclose, notre propos dodelinera.

De la recherche appliquée à la rencontre clinique, une étrange conversion nous conduira, d’annonciation en renonciation et dénonciation, à une esquisse phénoménologique de l’inattendu, comme une étincelle jaillie d’un contact subreptice, entre hasard et causalité. Nous tenterons ainsi de décrire, comprendre et transmettre quelques phases d’un processus complexe que nous désignons sous le nom d’intentionnalité partagée. Le transfert en serait, entre autres, partie prenante dans la mesure où, pour dévier malicieusement une humoristique ellipse d’Einstein, l’inattendu est le transfert qui, tel un ange, passe incognito.

« Tout ce qui est de l’imprévu est du convenu pour moi. » Via cette confidence bouleversante d’un patient recueillie par Minkowski, nous rappellerons aussi comment, parmi toutes les pertes ou butées existentielles de la psychose, le plaisir subtil et l’émotion à voir émerger l’inattendu défaillent radicalement dans la relation rompue à un monde devenu inapte à faire écho et à entrer en résonance avec soi-même, donc avec l’autre.