Témoigner de l’expérience d’être étranger. Une expérience groupale d’un atelier écriture-peinture dans un contexte d’immigration forcée

L’ Étranger en situation d’exil ou d’immigration forcée se confronte à la perte, à la rupture ainsi qu’à l’angoisse de l’inconnu. Telle la double figure de Janus, il est à la fois tourné vers la nostalgie du passé et vers la crainte de l’avenir, le présent étant fait de cette déchirure plus ou moins surmontable. L’exil et le déracinement opèrent une disjonction existentielle profonde entre désaffiliation imposée et adhésion à des liens inédits à la société d’accueil. Par souci d’adaptation, par désir d’intégration, l’Étranger, tait sa souffrance traumatique liée à la perte de ses références originelles constitutives de ses assises identitaires. Pouvoir dire quelque chose de cette expérience de rupture est une tâche difficile, d’autant que l’appropriation de la langue étrangère est un processus long auquel s’ajoute la dimension souvent insoupçonnée du traumatisme qui confronte l’Étranger exilé à un irreprésentable. Occasionnellement, alors même que l’ancrage dans la société d’accueil semble ferme, ces expériences traumatiques vont trouver une voie d’expression. À partir d’une présentation d’un dispositif groupal d’ateliers peinture- écriture pour personnes d’origines étrangères immigrées en situation d’apprentissage de la langue française, je relaterai comment le groupe, entre processus cathartiques et affiliation réparatrice, permet la création d’une écriture pour dire et d’une image pour montrer ce qui a constitué jusqu’à lors alors un vécu d’étrangeté d’être étranger.