Vermeer ou «l’intime de la perle »

L’intime, ce qu’il y a de plus profond dans une chose, est
l’essence même de l’œuvre de Vermeer, plus particulièrement dans le tableau La jeune fille à la perle (1665). Ce tableau
dont la composition, d’une sobriété exemplaire, à la palette de
tons très restreinte, attire le regard du spectateur vers le bijou,
perle appendue dans l’ombre, à l’oreille de la jeune fille, et dé-
tourne de l’objet secret de son auteur, dans un déplacement
subtil de la bouche vers l’oreille.
Nous observerons ici le renversement d’une agressivité avide
à une quiétude sereine. Nous comparerons ce tableau à celui de
La laitière (1660) dont la lumière contraste avec le fond sombre
et uniforme de La jeune fille à la perle. Les mêmes teintes se
retrouvent, et la blancheur laiteuse de la perle ferait écho au
filet de lait coulant du pot tenu par la laitière.
Les femmes sont au centre de l’œuvre de Vermeer. Sous la
tranquillité apparente de ces scènes intimistes, les rideaux et
tapis seraient autant de voiles à la curiosité avide et au désir
transgressif de la chose que Vermeer, sous les traits du peintre,
du géographe ou de l’astronome, n’a de cesse d’explorer et de
découvrir. L’entremetteuse (1656) écarte le voile sur les plaisirs clandestins et interdits où la main gauche de l’homme est
posée sur le sein de la jeune prostituée pendant que l’autre main
monnaye l’échange d’une pièce d’or, sous le regard du peintre,
mis en scène dans le tableau, se faisant complice de celui qui
regarde.
Vermeer a choisi ce regard en coin pour la Jeune fille à la
perle. L’intime est à l’œuvre dans un voilé /dévoilé dont le
rendu des formes estomperait l’agressivité latente d’une avidité
sans limites.

Auteur
Berlende Lamblin
psychanalyste,
docteur en psychanalyse
berlende@hotmail.fr
Référence
RA010-10
L’Intime
Journées d’Automne 2017
Catégories
Peinture
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