La tauromachie, Goya, et la violence picturale

Au cours de l’histoire, la peinture offre de nombreuses scènes de grande violence : guerres, viols, enlèvements, tortures expriment les pulsions les plus archaïques de l’homme.

Parmi ces artistes, Francisco Goya. En 1792, une grave maladie va bouleverser et sa vie et son œuvre. Hallucinations, angoisses, êtres fabuleux hantent ses nuits. Ses cauchemars se peuplent d’obsessions que tenteront d’exorciser ses eaux-fortes, comme dans Les caprices, ou une violence extrême dans Les désastres de la guerre; violence du sujet surtout.

« Né avec un tempérament ardent et actif, (…] Il m’a été dénié de trouver un soulagement dans la société de mes pareils […] De telles expériences me portaient au bord du désespoir. Ce n’est que l’ Art, !’Art seul qui a retenu ma main. [… ] »

Certaines peintures portent au paroxysme une cruauté exacerbée, comme Saturne dévorant un de ses fils, ou Deux vieillards mangeant de la soupe, par exemple. Et notamment par leur traitement pictural, ces œuvres, composées de taches fiévreusement brossées, atteignent une grande violence expressive.

Mais c’est la gravure qui permet le mieux à Goya d’affirmer sa désespérance. Dans La tauromachie (suite de 40 planches à l’eau forte), Goya s’identifie à la férocité tauromachique par l’acte même de graver. Le cuivre n’est pas une feuille de papier; tailles et contre tailles griffent le métal pour le creuser; elles constituent de véritables agressions gestuelles.

On constatera combien, en de très rares occasions au cours de l’histoire, la gravure s’est élevée à une telle réunification des antagonismes entre goût et sublimation de la violence.

Quelle œuvre, mieux que La tauromachie, pouvait exprimer le drame de Goya pris entre la fascination de la mort et la puissance rituelle du sacrifice.

Auteur

Gérard Bouté

ancien directeur d’école d’art, commissaire d’exposition
Référence
RA014-06
Violences
Journées d’Automne 2019
Catégories
art-thérapie, psychologie, cinéma, musique
Noms propres
Duchamp M., Hergé, Caravage M., Sadoul N.
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