Alors qu’il jette habituellement des feuilles en hurlant « pas beau ! », Luis décide de m’en tendre une, toute barbouillée, qui montre, en son centre, un énorme trou produit avec
violence. Il me fait tenir avec lui sa feuille et, face à ce trou, il est pris d’une agitation fébrile, comme à demi-conscient.
Vu la durée de cette sorte de transe et la sérénité qui suit cette décharge, on dirait qu’un affect lié à un trauma vient d’être dépassé. Qu’il troue violemment lui-même cette feuille lui a-t-il permis un gain de maîtrise face à la chose qu’il subissait? Le maintien du regard en position centrale et fixe a-t-il provoqué des effets hypnogènes ?
Luis va prononcer pour la première fois d’autres mots que« pas beau !». Une éducatrice dira : « Cette voix, c’est comme si elle était toute neuve».
Des représentations inconscientes sont-elles liées à ce trou ? Et ses mots tentent-ils d’objectiver l’événement traumatique? Les trois mots qu’il prononce quelques jours plus tard : « mon, souris, mal, » vont inaugurer le défilé d’une nouvelle chaîne associative : la sienne.
La clinique du quotidien nous tient à l’abri des grands discours généralistes au sujet de la violence des enfants autistes – pour peu qu’on prenne le temps d’écouter ce qu’est la violence privée de celui que l’on rencontre:« comment il la cultive peut-être, comment il s’y emploie vis-à-vis de lui-même ou des autres.»
Auteur |
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Jean-Pierre Royol psychologue |
Référence |
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RA014-21 Violences Journées d’Automne 2019 |
Catégories |
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art-thérapie, psychologie, cinéma, musique |
Noms propres |
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Duchamp M., Hergé, Caravage M., Sadoul N. |
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