L’atelier d’art-thérapie, une parenthèse de silences

Les événements de nos vies s’envolent. Reste souvent l’essentiel, inscrit dans le corps, silencieux, qui ressurgit dans la force étonnamment vive et parfois incompréhensible d’une émotion traduite dans la dynamique d’un processus d’expression. Le souvenir n’est plus, mais la mémoire sensuelle du corps parle toujours. Proust n’est pas loin. Cependant ce n’est peut-être pas seulement le goût de la madeleine qui fait ressusciter le souvenir, mais le trouble sensoriel ressenti qui appelle ce même émoi sensuel de l’enfance. Le monde existe à travers nos sens avant d’exister de façon ordonnée dans notre pensée. Le silence nous ramène souvent, au fil de l’existence, à voir écouter, observer, entendre, toucher, caresser, sentir, humer, goûter, retrouver goût pour la vie, pour les autres, développer cette faculté créatrice de sens. L’art-thérapie se nourrit de cette dynamo vitale pour faire naître ou renaître ces souvenirs nécessaires au traçage de l’imperceptible force qui nous meut. Faire silence en soi, retrouver cette empathie avec le vivant qui « bruit » en nous, passe par notre capacité à faire corps avec le réel. Dans ce terreau d’affects qui nous forge et continue sans cesse de nous forger, comment le silence bienveillant d’un atelier d’art-thérapie peut-il nous inviter à renouer avec notre capacité de sentir et ressentir, d’être mû, ému, touché et de communiquer tout cela à d’autres qui vivent et partagent ce langage commun ?