Silence

« Ce dont on ne peut parler, il faut le taire. »
Wittgenstein

Comment le geste artistique et nos pratiques cliniques peuvent-ils être concernés par le silence ? Dans la symptomatologie psychopathologique, le silence a partie liée avec le mutisme. Entre acquiescement tacite, réticence, impossibilité de réponse et silence de mort, le silence, les silences revêtent des significations différentes et souvent contradictoires.

Contrairement au vide, le silence n’est ni absence ni vide représentationnel. Il ne s’oppose pas à la parole mais, porteur de sens, il en constitue la toile de fond. Des artistes contemporains comme John Cage dans 4’33 ont pu saisir le silence dans leurs compositions, des cinéastes le montrer dans les Silent movies, des peintres tel Zao Wou-Ki dire dans leurs toiles que « l’espace est silence ». Si Shakespeare a pu terminer son Hamlet sur « le reste est silence », de quel reste le silence se fait-il la parole ? Entre l’indicible du sublime et celui de l’horreur, le silence semble une figure de l’excès, un réel assourdissant en deçà ou au-delà des mots.

La présence de la mère, cette « musicienne du silence », fait accéder l’enfant à la capacité d’être seul sans se sentir abandonné. Qu’en est-il de la présence, souvent silencieuse, de l’analyste, de l’art-thérapeute ? Comment la pratique artistique engage-t-elle le silence dans son geste, son contenu, dans sa réception même ? Ainsi, le saisissement esthétique que produit l’œuvre d’art nous met aux prises avec le silence  — nous pouvons rester interdits, bouche bée devant l’art. C’est à ces différentes questions — cliniques, artistiques, thérapeutiques — que nous tentons de répondre en mettant au travail les interventions et intermèdes artistiques face aux figures du silence et aux sens multiples auquel il nous convie.