Les domaines de l’errance

La première association qui vient autour de l’errance est celle de la connotation négative qui lui est associée. On pourrait pourtant ne voir en elle qu’un simple comportement d’hésitation ou d’attente, comme celles des amoureux, des chercheurs ou de l’amateur d’art. Le problème survient quand l’errance s’installe et devient un état permanent. Elle condamne alors le sujet à errer sans jamais s’arrêter, mû par la seule nécessité de répéter un mouvement qui ne trouve sa justification qu’en lui-même, tel un cercle vicieux dans lequel la cause et l’effet se mordent la queue. Le non-dupe erre a écrit Lacan. Cette référence resitue la question du sens que prend l’errance dans l’histoire et la structure psychique du sujet. Capable d’autonomie l’individu sait où aller et poursuit sa trajectoire jusqu’à son terme. Celui qui erre n’y parvient pas. Il avance en faisant du surplace dans une course sans fin, un temps et un espace sans limites et sans orientation. Les errances antisociales, politiques, celles des moeurs, des exilés, du consommateur, du peuple juif, des âmes des morts prennent une dimension cosmique et métaphysique vouant le sujet errant à la permanence d’un temps long se déroulant dans un espace mal défini, où seule la mort pourrait mettre un terme. Acquise et innée, la passivité de l’errance est question de tempérament, de libido, de confiance. Faillite du moi, victoire de la pulsion de mort, défaite de l’élan, cause interne ou externe, tout y est couplé dans une interaction permanente.

Auteur
Luc Massardier
psychiatre
lucmass@wanadoo.fr
Référence
RA016-02
Errances
Journées de Printemps 2021
Catégories
art-thérapie, psychologie, cinéma, musique
Noms propres
Duchamp M., Hergé, Caravage M., Sadoul N.
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